Le Liban est aux prises avec une situation de crise prolongée et multidimensionnelle qui a plongé la majorité de sa population dans la pauvreté et la misère. Ainsi, entre 2018 et 2023, le PIB du pays a chuté de 54,9 milliards à 17,94 milliards $ US. De la même façon, le PIB par habitant est passé de 9 226 $ US à 3 350 $ US.
Par conséquent, la pauvreté a plus que triplé au cours de la dernière décennie. Environ 44 % de la population vit aujourd’hui dans la pauvreté, les taux de pauvreté atteignant 70 % dans les zones les plus défavorisées du Liban (voir rapport en anglais). Les prix des denrées alimentaires ont grimpé de 5 000 % par rapport aux niveaux pré-COVID (voir aperçu en anglais), et 23 % de la population est confrontée à des niveaux élevés d’insécurité alimentaire aiguë (voir évaluation en anglais). En 2022, l’espérance de vie aura chuté de plus de cinq ans par rapport au pic de 2018, pour atteindre 74,4 ans. Sans surprise, en 2024, 38 % des Libanaises et Libanais ont déclaré envisager d’émigrer dans une enquête d’Arab Barometer, 72 % d’entre eux citant des raisons économiques comme motivation (voir communiqué de presse en anglais).
Au cœur des enjeux se trouve une crise institutionnelle très profonde dont les origines remontent au Pacte national de 1943 qui a instauré un système confessionnel, à la guerre civile due à un certain remaniement de celui-ci en 1975, ainsi qu’aux accords de Taëf de 1990 qui ont mis fin à la guerre civile. Par ces accords, les hautes fonctions de l’État sont réservées à des confessions religieuses désignées d’avance sur la base de leur poids démographique de 1990. Ainsi, les chrétiens maronites auront la présidence de la République, les musulmans sunnites la présidence du Conseil des ministres et les musulmans chiites la présidence de la Chambre des député·e·s.
Des conséquences importantes sont engendrées par ce système au fil des années telles que le dysfonctionnement de l’État, la paralysie des institutions politiques et la corruption endémique. Cependant, un constat s’impose aujourd’hui : l’existence et la structuration d’une société civile qui ne se reconnaît pas, ou de moins en moins, dans le carcan politique confessionnel, et qui fonde ses revendications de participation solidaire, sociale, et démocratique, et sa force de proposition sur le concept laïc de citoyenneté.
La population remet en question les fondements sur lesquels les groupes actuels au pouvoir basent leur légitimité aux commandes de l’État, et auxquels ils s’accrochent farouchement. Entre-temps, le système est paralysé et très régulièrement, le pays se retrouve sans président de la République ou sans président du Conseil des ministres, alors que le président de la Chambre des député·e·s est en poste depuis 1992.
Ces blocages institutionnels affectent les aspects de la vie de tous les jours, tels que l’accès au travail, le pouvoir d’achat, l’approvisionnement en eau, en essence, la santé, l’électricité, jusqu’à la collecte des ordures. Des décisions importantes et nécessaires pour le pays ne sont pas prises à temps ou ne sont pas prises du tout, ou alors, elles ont tellement été négociées au plus petit dénominateur commun qu’elles n’ont plus d’impact réel. L’aide et l’intégration des personnes migrantes et réfugiées sont également affectées. D’ailleurs, les partis politiques et les factions religieuses font peser la responsabilité des maux qui affligent le Liban sur celles-ci.
Le Liban accueille plus de réfugié·e·s que tout autre pays dans le monde (voir aperçu en anglais) par habitant et par kilomètre carré. Cela comprend 1,5 million de personnes réfugiées syriennes et plus de 489 000 palestiniennes. Ensemble elles représentent plus d’un tiers de la population nationale libanaise estimée à 5,3 millions.
Le 4 août 2020, un désastre sans précédent ayant de surcroît frappé le cœur du pays, 2 750 tonnes de nitrate d’ammonium mal entreposé dans des hangars du port de Beyrouth ont explosé brutalement. La catastrophe a entraîné la destruction de quartiers entiers de la capitale, causant ainsi la mort de plus de 200 personnes et des blessures à plus de 6 500 autres, et plongeant au chômage et dans le besoin d’aide environ 1 million de Beyrouthines et Beyrouthins. Les dégâts matériels ont été estimés à 15 milliards $ US, soit quasiment la totalité du PIB du pays.
S’ajoutant à toutes les crises, l’ampleur et l’étendue de la destruction ont été telles que le Liban ne peut pas se relever seul de cette énième tragédie, malgré le courage, la force et la résilience de son peuple et de sa société civile, naturellement tournée vers l’extérieur des frontières libanaises, sa diaspora, et l’aide internationale.
Depuis les événements du 7 octobre 2023 en Israël et la guerre sanglante dans la bande de Gaza, le Sud du Liban fait également les frais des combats entre le Hezbollah et Israël. Au détriment de la population civile, ce conflit intensifié semble devoir durer au moins aussi longtemps que les opérations militaires meurtrières d’Israël à Gaza se poursuivront.
Cette situation impose un poids considérable au peuple libanais, du fait notamment des déplacements des habitants du sud, et de l’affaiblissement de l’État libanais.
Développement et Paix – Caritas Canada est solidaire des populations libanaises et étrangères installées au Liban depuis le Printemps des cèdres, et la fin de la tutelle politique syrienne sur le pays, en 2005. Il s’agissait alors de soutenir la société civile émergente, d’aider les personnes réfugiées irakiennes et palestiniennes isolées, ou encore les collectivités libanaises ciblées par des attaques aériennes du gouvernement israélien en sol libanais menées dans leurs villes ou sur les infrastructures du pays. Depuis ce temps, nous soutenons régulièrement les nombreuses travailleuses et travailleurs migrant·e·s en situation de précarité dans les grandes villes libanaises.
Au cours de la dernière décennie, nous avons mis sur pied une importante programmation visant spécifiquement à répondre aux besoins des populations réfugiées syriennes au Liban, mais aussi des Libanaises et Libanais également en situation de vulnérabilité.
Notre programmation actuelle au Liban est étroitement liée à aux événements majeurs de l’histoire récente du Liban : les lendemains de la guerre en Syrie, les explosions d’août 2020 à Beyrouth, les événements du 7 octobre 2023 en Israël et la guerre menée dans la Bande de Gaza et dans le Sud du Liban depuis.
Concernant la guerre en Syrie, notre réponse s’articule en quatre objectifs de programmation liés entre eux par un axe transversal sur l’égalité des genres :
Notre travail en partenariat avec Caritas Liban offre des soins de santé primaires, un soutien psychosocial et d’autres services vitaux aux personnes migrantes et réfugiées ainsi qu’aux Libanaises et Libanais en situation de vulnérabilité.
En 2020, nous avons apporté une réponse d’urgence immédiate juste après les explosions du port de Beyrouth et nous avons continué à répondre aux besoins financiers, économiques et politiques des communautés touchées par cette crise et les autres à moyen et à long terme.
En 2020-2022, à la suite des destructions du port et de la ville de Beyrouth, nous avons :
Dans le cadre de notre travail sur la consolidation de la paix et la participation citoyenne au Liban et dans la région du Moyen-Orient, nous soutenons des organisations expertes en prévention des conflits et en éducation à la citoyenneté, tel que la Fondation Adyan. Ce soutien comprend la formation et le renforcement des capacités des jeunes femmes et hommes activistes vivant en régions conflictuelles – souvent frontalières – afin qu’elles et ils acquièrent les connaissances et les savoir-faire nécessaires pour bâtir des communautés moins clivées, plus justes et pacifiques, et pour plaider en faveur de l’établissement de structures décisionnelles participatives et démocratiques.
Ces jeunes étudient et dressent l’état des lieux des sources de conflits, organisent des projets communautaires inclusifs, font dialoguer les populations avec les autorités, documentent les violations des droits humains, et font entendre leurs voix dans les arènes locales, régionales et internationales où nos projets et leurs réseaux leur permettent de le faire.
Le conflit à la frontière avec Israël a exacerbé une pauvreté déjà répandue, nécessitant une aide immédiate, complète et organisée au Liban. En réponse, Caritas Liban a lancé un nouveau projet multisectoriel pour les personnes déplacées à l’intérieur du pays, les personnes risquant d’être déplacées, les femmes libanaises très vulnérabilisées, les migrant·e·s et les réfugié·e·s touché·e·s par le conflit et les crises à plusieurs niveaux.
Grâce à ce projet, Caritas Liban répondra aux besoins urgents de base et de protection des personnes et des familles touchées par le conflit dans le Sud en leur fournissant des abris et des logements, des services de santé primaires et secondaires essentiels et une aide financière d’urgence.
Mis en œuvre à Beyrouth, dans la vallée de la Beqaa, dans le gouvernorat du Mont-Liban, dans le Nord et dans le Sud (focus spécial), le projet touchera 12 049 personnes directement et plus de 40 600 indirectement.
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