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Lettre ouverte à la communauté internationale, pourquoi le peuple haïtien a besoin de notre soutien ?

Urline Poldor, 44 ans, Commune de Maniche, localité Robert, mère de deux enfants

Par Mary Durran, chargée de programmes pour l’Amérique latine, et Luke Stocking, directeur général par intérim

En cette Semaine du développement international, n’oublions pas Haïti !

À l’occasion de la semaine de développement international 2025, nous aimerions attirer votre attention sur un pays qui, malgré de nombreux défis, fait toujours preuve d’une résilience incomparable : Haïti.

En 2025, ce pays célèbre deux anniversaires clés de son histoire : le 15e du tremblement de terre du 12 janvier 2010 qui a détruit Port-au-Prince, et qui a tué plus de 250 000 personnes; et les 200 ans de l’obligation imposée par le roi Charles X de payer 9 millions de francs à l’État français pour son indépendance. Une dette faramineuse qui a troqué l’esclavage sur les plantations par l’esclavage économique et qui a nui au développement du pays et à son économie. Cet anniversaire est particulièrement frappant en cette année où une campagne mondiale contre les dettes injustes est en cours.

Aujourd’hui, enlisé dans une crise sécuritaire, politique et économique, Haïti souffre encore. La mainmise des gangs armés sur le pays a causé la mort de 5 600 personnes en 2024, presque 1 500 enlèvements contre rançon et le déplacement de plus d’un million de personnes. En parallèle, la République dominicaine a déporté plus de 276 000 Haïtien·ne·s dans leur pays d’origine (lire l’article en anglais).

Malgré l’embargo imposé par l’ONU, les armes continuent à entrer illégalement au pays, provenant principalement de la Floride et de la République dominicaine, et les gangs continuent de s’en servir pour terroriser la population : des massacres, des viols, des attaques d’hôpitaux et l’assassinat de journalistes sont monnaie courante. La Police nationale d’Haïti est sous-équipée et manque d’effectifs. La Mission multinationale de soutien à la sécurité (MSS) a reçu à peine 600 militaires internationaux quand la communauté internationale en avait promis 2500. N’ayant reçu que 97,4 millions $ sur les 600 millions $ qui devaient être alloués par la communauté internationale dans la première année, la MSS a donné de piètres résultats. La décision des États-Unis de suspendre le financement du MSS ne peut pas aider.

Les besoins humanitaires aujourd’hui sont criants : la moitié de la population est affectée par l’insécurité alimentaire, plus d’un million de personnes déplacées vivent en situation de précarité, exposées aux violences et aux exactions des gangs, à la maladie et la faim. Les régions à l’extérieur de Port-au-Prince, où règne un calme relatif, reçoivent un flux de personnes déplacées, quand les familles d’accueil ont de la difficulté à alimenter leurs propres membres. Un grand nombre de ces personnes déplacées se dirigent vers la péninsule sud, toujours pas relevée des dégâts causés par l’ouragan Matthew en 2016 et le séisme en 2021.

Appel à la communauté internationale

En cette année importante, nous rappelons que les défis complexes d’Haïti sont les conséquences de l’exploitation structurelle, en particulier par des économies étrangères, et que la situation actuelle menace gravement la survie du peuple haïtien.

Développement et Paix – Caritas Canada fait un appel à la communauté internationale pour que l’élimination de l’exclusion et la disparité sociale soit au cœur de toute initiative qui vise un meilleur avenir pour toutes les Haïtiennes et Haïtiens à travers des actions concrètes :

  • Augmenter les contributions à l’appel humanitaire de l’ONU de 674 millions $ lancée en février 2024, dont seulement le 43,5 % est actuellement financé. Le Canada ne propose de fournir que 1,6 % de ce montant (lire le rapport en anglais). Le Canada peut et doit en faire plus !
  • Renforcer les services gouvernementaux à travers le programme d’aide du Canada à Haïti, principalement à l’extérieur de Port-au-Prince où les personnes déplacées se sont dirigées. Renforcer également les services de santé et d’éducation, et des services déconcentrés de l’état en agriculture, protection civile et protection de l’environnement pour assurer les besoins de ces nouveaux arrivants à moyen et à long terme et éviter un nouvel exode à Port-au-Prince une fois la paix rétablie.
  • Appliquer la résolution 2653 contre la circulation illégale d’armes à Haïti, en particulier depuis les États-Unis et la République dominicaine.
  • Encourager le Conseil présidentiel et la justice haïtienne à poursuivre et sanctionner les personnes responsables d’avoir recruté, financé et armé les gangs criminels.
  • Lancer un programme bien financé et à large spectre pour renforcer les capacités administratives et judiciaires de l’État haïtien, avec une proportion consacrée à l’amélioration de l’efficacité du MSS et au renforcement et l’équipement de la police nationale. Les leçons tirées des échecs des opérations armées internes et externes passées doivent être intégrées dans la conception et la mise en œuvre de toute intervention liée à la sécurité. Celle-ci doit inclure une surveillance civile étroite par les organismes de défense des droits humains, une limitation stricte des mandats et un programme de démobilisation viable pour les membres des gangs.
  • Ne pas se limiter à fournir une réponse à court terme à la situation sécuritaire ; adresser des enjeux clés, comme les réformes constitutionnelle et électorale et de la justice, et s’engager à investir dans un véritable développement durable en Haïti, en donnant au peuple haïtien les moyens de déterminer leur propre avenir.
  • Suspendre la déportation des Haïtiennes et des Haïtiens, car le pays n’a pas les ressources nécessaires pour accueillir ces personnes déportées.

Finalement, à l’occasion du 200e anniversaire de l’imposition d’une dette à Haïti pour acheter son indépendance, nous appelons la France à engager un dialogue avec Haïti et à envisager des réparations. Cette injustice fondamentale fait que la France porte une dette morale et financière envers Haïti, et a une occasion unique d’agir 200 ans après.

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