Par Kathleen Cross, Chargée de campagne – plaidoyer et mobilisation
Comme il reste très peu de temps pour éviter les effets catastrophiques des changements climatiques, il est impératif que les négociatrices et les négociateurs de la COP26 tentent d’obtenir un changement fondamental en s’éloignant des fausses solutions qui protègent les intérêts du marché et le statu quo.
Pour protéger la dignité de toutes celles et tous ceux qui partagent cette planète, les droits de la personne doivent être au centre des politiques climatiques. Malheureusement, cet aspect est souvent négligé lors des négociations politiques qui ont tendance à se concentrer sur la seule dimension économique.
Humaniser l’analyse et l’action climatique
Le changement climatique ravage déjà de nombreuses communautés, coûtant des vies, détruisant des écosystèmes et forçant les déplacements. Si une certaine restauration écologique est possible, de nombreux changements demeurent irréversibles.
Les COPs précédentes ont défini le concept de pertes et préjudices dans le cadre du mécanisme international de Varsovie et du Réseau de Santiago, mais ceux-ci n’ont pas encore été utilisés pour fournir des mesures ou des compensations efficaces. S’il est bien appliqué, le principe des pertes et préjudices serait un moyen éthique de faire face aux répercussions de l’inaction climatique sur les communautés du Sud ainsi qu’aux dommages irréversibles qu’elle engendre.
La CIDSE note que les pertes et préjudices devraient être considérés, au même titre que les émissions, comme une mesure de l’impact humain du changement climatique et des actions prises pour atteindre les objectifs de l’Accord de Paris. La COP26 doit convenir d’un indicateur de résultat pour permettre aux pertes et préjudices d’être mis en œuvre immédiatement.
Le financement des pertes et préjudices doit également être une priorité permanente lors des COP, tout comme l’adaptation et l’atténuation. La COP26 devrait également entériner le principe du pollueur-payeur, en taxant les bénéfices des entreprises polluantes afin de contribuer aux pertes et dommages causés par leurs actions ou inactions.
Fausses solutions
La géo-ingénierie, le captage et le stockage du carbone ainsi que les marchés du carbone ne s’attaquent pas à la cause profonde du problème, à savoir qu’une petite partie des habitants de la Terre, y compris les Canadiennes et les Canadiens, consomment plus que leur juste part des ressources et produisent plus d’émissions notre planète ne peut en tolérer.
Le concept de « salut technologique » donne de faux espoirs dans des processus non éprouvés pour résoudre un problème qui, étant d’origine humaine, exige des solutions humaines. L’Alliance des Réseau Ecclésiaux pour l’Écologie Intégrale (ENA) estime que « la COP26 offre une opportunité unique de changer de cap et d’entreprendre la transition vers un nouveau système social, économique et culturel qui met fin à nos formes et structures injustes envers les personnes et la nature. »
Dans Laudato Si’, le pape François nous appelle à résister au paradigme technocratique et à nous connecter aux autres, non pas simplement par des moyens numériques facilement défilés et ignorés, mais par des moyens qui reconnaissent pleinement l’esprit humain et la dignité innée de chaque personne. Alors que les politiques climatiques sont discutées à la COP26, nous devons veiller à ce que les personnes ne soient pas réduites à des pions censés s’adapter aux plans économiques et politiques et à ce que le développement humain intégral soit au centre des actions climatiques.
Les solutions à cette crise ne se limitent pas à la réduction des tonnes de CO2, mais commencent par un engagement collectif à changer radicalement nos modes de vie et à cesser toute activité nuisant à l’environnement et à ceux qui le défendent. La solution devrait inclure la reconnaissance et le soutien des solutions fondées sur la culture (CbS) et le paiement des services verts.
L’Alliance des Réseau Ecclésiaux pour l’Écologie Intégrale, 2021; 6
Une vision intégrale de l’utilisation des terres
Ensemble, le changement d’affectation des terres et la gestion forestière sont à l’origine d’un tiers des émissions cumulées. Ces phénomènes sont également responsables de la perte de biodiversité. En tant que tels, ils constituent des domaines de préoccupation majeure dans la planification des actions climatiques. Les initiatives climatiques doivent être conçues de façon à empêcher la dégradation des terres, à protéger les écosystèmes et les cours d’eau et à donner la priorité aux personnes plutôt qu’aux profits.
Nous avons vu comment le fait de privilégier les solutions économiques et technologiques au détriment des droits des personnes peut être nuisible, en particulier pour les populations déjà vulnérables. Les programmes d’énergie verte, les solutions fondées sur la nature et même les programmes d’adaptation et d’atténuation doivent être définis de manière à bénéficier à celles et ceux qu’ils affectent directement et à prendre en compte les points d’intersection entre le climat et le développement.
Une attention particulière doit être accordée aux droits des peuples autochtones, qui sont les protecteurs de 80 % de la biodiversité et d’une grande partie des forêts de la planète. La simple consultation des parties prenantes dans les plans climatiques doit être remplacée par des approches qui collaborent véritablement avec les communautés locales et préservent le droit des peuples autochtones à exercer un consentement libre, préalable et éclairé.
Le changement climatique implique de faire changer les cœurs et les esprits (une véritable métanoïa en termes de foi), changer les politiques et les pratiques vers une mentalité de « changement de système ». La COP26 doit prendre les premières mesures radicales pour établir un nouveau contrat planétaire inclusif et socialement juste, au-delà des objectifs matériels de « profit ».
L’Alliance des Réseau Ecclésiaux pour l’Écologie Intégrale, 2021; 6