Par Dean Dettloff, animateur pour l’Ontario centre
En décembre 2020, deux défenseurs de la terre, Víctor Vásquez et José Santos Vigil Girón, des Autochtones Lenca, ont été injustement incarcérés au Honduras, à la suite de plaintes non fondées d’hommes d’affaires locaux. L’automne dernier, c’est l’histoire de Víctor qui était au cœur de notre campagne Les gens et la planète avant tout.
Grâce à une défense habile, pilotée par le partenaire de Développement et Paix CEHPRODEC, ainsi qu’à une solide campagne de plaidoyer au niveau local et international, Víctor et José ont été relâchés le 15 octobre 2021. À sa sortie, Víctor disait : « Dans ce pénitencier, je ne me suis pas senti seul, je me suis senti fort grâce à la chaleur du soutien apporté par tous mes frères et mes sœurs au niveau national et international ». Mais Víctor et José attendent toujours leur procès, et leur bataille légale est loin d’être terminée. Il est crucial de maintenir le soutien public international à la défense des Lencas, de leurs militants, de leurs terres et de leur souveraineté.
En tant qu’animateur, j’ai souvent eu à parler de la situation de Víctor et à rappeler l’importance de la collecte de fonds et de la construction d’une solidarité mondiale, à partir du Canada. Le moment le plus gratifiant dans le partage de cette histoire s’est passé avec les élèves des écoles catholiques. En rencontrant par vidéoconférence quelques douzaines de classes et de clubs au cours des six derniers mois, un message clair s’est imposé : ces jeunes cherchent la justice et veulent faire partie de la démarche pour y arriver.
Au cours de discussions quant à une retraite axée sur la campagne, l’aumônier Andrew Selvam, de l’école secondaire catholique Iona à Mississauga en Ontario, se demandait si les élèves pourraient communiquer directement avec Víctor. La chargée de programmes Mary Durran a donc lancé l’idée auprès de CEHPRODEC. Ils ont exprimé l’intérêt de recevoir des lettres ou des cartes de solidarité, qui permettraient de maintenir le soutien public. Nous avons finalement choisi de faire une retraite pour les élèves de 12e année afin de présenter la solidarité comme principe clé de l’enseignement social de l’Église et d’expliquer le combat de Víctor et José, tout en permettant aux élèves de fabriquer des cartes de Noël pour les soutenir.
La pandémie ayant ralenti la distribution internationale du courrier, et la saison de production du café ayant été très occupée, les cartes ne sont pas arrivées à temps pour Noël. Malgré cela, nous avons été ravis de recevoir, au début de février, une photo de membres du Conseil autochtone de Simpinula au Honduras tenant les cartes dans leurs mains. Sur une grande banderole blanche, ils avaient écrit « Vos messages ont été reçus avec amour et affection. Simpinula résiste! »
Ces cartes envoyées par des jeunes de l’Ontario ne vont probablement pas influencer un juge au Honduras, mais elles rappellent aux Lencas qu’ils ne sont pas seuls. Et elles nous rappellent à nous au Canada que nous ne sommes pas déconnectés des luttes qui ont cours de l’autre côté de l’équateur.
Dans Fratelli Tutti, le pape François nous dit que la solidarité signifie « penser et agir en termes de communauté ». Développement et Paix aide les élèves à se voir comme partie prenante d’une communauté mondiale, sachant que nous sommes toutes et tous intégralement connectés. Lorsque les gens qui résistent à l’injustice sont isolés, il est facile pour les gens au pouvoir de les ignorer ou même de les neutraliser en douce. En créant des liens de solidarité mondiale, l’on démontre que de plus en plus de personnes restent vigilantes, face à des personnes ou des enjeux spécifiques, et s’attendent à ce que justice soit faite.
Pendant l’Avent, les élèves se sont préparés à la naissance du Christ en envoyant des messages de solidarité. Aujourd’hui, pendant le Carême, alors que nous entrons dans la souffrance du Christ, nous devons continuer de chercher des façons créatives d’exprimer notre solidarité envers celles et ceux que le jésuite salvadorien Ignacio Ellacuria appelle « les crucifiés ». Nous devons mettre les gens et la planète avant tout, en refusant les mensonges de la grande industrie qui veut raser les terres ancestrales, et en nous tenant aux côtés de celles et ceux qui, comme Jésus, résistent aux pouvoirs impériaux injustes, même au prix de leur liberté.
¡Simpinula resiste! ¡Nosotros estamos contigo!