La crise des Rohingyas : un rappel enflammé

Par Minaz Kerawala, Conseiller en communication et relations publiques

Pour aggraver davantage la crise des Rohingyas, un incendie s’est déclaré dans un camp de réfugié·e·s à Cox’s Bazar, au Bangladesh, le 24 mai 2024. Grâce à la vigilance des volontaires qui ont suivi des protocoles d’urgence rigoureux, aucune perte de vie n’est à déplorer. Cependant, l’incendie au Camp 13 a eu de lourdes conséquences.

Dix-huit personnes ont été blessées et au moins 221 abris ont été endommagés ou détruits (voir rapport en anglais), laissant 1 300 personnes sans logement. Caritas Bangladesh, partenaire local de Développement et Paix – Caritas Canada, a également subi des pertes importantes. Deux de ses espaces adaptés aux enfants et un espace de sécurité communautaire ont été détruits, de même qu’un important entrepôt et centre de distribution.

Ce n’est pas le premier incendie de ce type, ni même le premier que nous signalons, et il est peu probable que ce soit le dernier. Selon l’Organisation internationale pour les migrations, il y a eu plus de 1 200 incendies dans les camps depuis 2018 (voir rapport en anglais).

Crise des Rohingyas : fragilité et inflammabilité

Deux facteurs contribuent au risque élevé d’incendie. Le premier est la surpopulation.

Fuyant ce que le Canada a reconnu comme une persécution génocidaire en Birmanie (Myanmar), des centaines de milliers de Rohingyas ont afflué au Bangladesh en 2017. Selon le dernier décompte, 978 003 d’entre eux sont maintenant entassés dans 33 camps denses qui constituent la plus grande colonie de réfugié·e·s au monde (voir mise à jour en anglais). Le fait que les camps ne soient pas reliés aux réseaux d’eau ne facilite pas les choses.

Le deuxième facteur est la façon dont les abris sont construits. Bien qu’il ait accueilli les réfugié·e·s rohingyas avec une générosité admirable, le gouvernement du Bangladesh a l’intention de les rapatrier à terme. Pour éviter de donner aux camps un air de permanence, il interdit l’utilisation de matériaux de construction durables.

Cela signifie que les abris doivent être construits en bambou et en bâche. Malgré cette contrainte, Caritas Bangladesh a fait un travail remarquable en construisant des abris bien conçus qui répondent mieux aux besoins des femmes. La formation et l’emploi fournis dans le cadre de son programme de logements, que nous soutenons depuis longtemps, ont renforcé le sentiment d’autonomie et d’indépendance économique des femmes.

Néanmoins, les abris demeurent vulnérables à toutes sortes de catastrophes.

Crise des Rohingyas : les caprices de la météo

Bien que la planification de la préparation aux catastrophes du Bangladesh soit exemplaire, les camps de réfugié·e·s restent exceptionnellement vulnérables aux intempéries, non seulement parce qu’ils se trouvent dans une région sujette aux inondations et aux cyclones, mais aussi parce que les abris sont très fragiles.

Chaque année, avant les saisons cycloniques estivales et automnales, Caritas Bangladesh et d’autres organisations travaillent d’arrache-pied pour renforcer les abris du mieux qu’elles peuvent. Lorsque les cyclones frappent inévitablement les camps, beaucoup d’efforts et de dépenses doivent être investis dans le sauvetage, le rétablissement et la reconstruction.

Les populations des camps ont été prises d’assaut par le cyclone Remal qui s’est formé dans le golfe du Bengale. Il a touché terre le 26 mai, semant la destruction et faisant 16 victimes dans 19 districts du Bangladesh. Les camps de réfugié·e·s ont été épargnés par le cyclone, mais ils n’ont pas toujours eu cette chance. L’année dernière, le cyclone Mocha avait détruit les abris de quelque 40 000 personnes réfugiées (voir appel en anglais).

Crise des Rohingyas : pénurie de financement

La mise à jour de mai 2024 du Groupe de coordination intersectorielle (voir en anglais), qui coordonne les agences humanitaires au service des réfugié·e·s rohingyas, est d’une lecture inquiétante. Seuls 16 % des 852,4 millions de dollars américains nécessaires pour le plan de réponse conjoint de cette année ont été collectés. Depuis 2017, la communauté internationale a contribué à moins des deux tiers des fonds requis.

Ce sous-financement est dévastateur pour les personnes réfugiées rohingyas qui, n’ayant pas le droit de travailler ou de voyager, sont totalement dépendantes de l’aide internationale. L’année dernière, même leurs rations alimentaires ont été réduites de 30 % en raison des contraintes budgétaires (voir article en anglais).

Bien que le financement d’Affaires mondiales Canada et la générosité des Canadiennes et Canadiens nous aient permis de soutenir un large éventail de programmes de Caritas Bangladesh pendant six ans, les fonds n’ont pas été maintenus. Actuellement, nous ne disposons que de fonds suffisants pour soutenir deux centres polyvalents pour enfants et adolescents où les filles et les garçons rohingyas reçoivent des soins, une instruction et un soutien transformateurs.

Avec la réduction de l’aide internationale, dont celle du Canada, Caritas Bangladesh doit maintenant faire face à une facture de 125 000 euros pour rebâtir l’infrastructure qu’elle a perdue dans l’incendie de la semaine dernière.

Rohingya crisis Crise des Rohingyas
Il en coûtera 125 000 € à Caritas Bangladesh pour reconstruire un entrepôt comme celui-ci et d’autres installations qui ont été détruites par l’incendie de mai 2024. (Suben Mondal/Caritas Bangladesh)

Crise des Rohingyas : ce qui est nécessaire et comment aider

La plupart des personnes réfugiées rohingyas aimeraient rentrer chez elles, ce que toutes les parties prenantes considèrent comme souhaitable. Malheureusement, la poursuite des violences en Birmanie rend cette perspective de plus en plus lointaine.

Perdant du terrain au profit des forces rebelles, l’armée birmane enrôle de force ces mêmes Rohingyas qu’elle chassait du pays. Ils ne sont pas non plus exempts d’être pris pour cible par les milices rebelles, comme l’a révélé un récent communiqué de presse des Nations Unies (voir en anglais).

Dans ce contexte, les appels lancés dans la déclaration commune publiée par Caritas Bangladesh et ses partenaires internationaux au début de l’année dernière demeurent pertinents aujourd’hui.

Nous réitérons la nécessité pour la communauté internationale de :

  • maintenir et augmenter le financement consacré à la crise des Rohingyas ;
  • faire pression sur la junte birmane pour qu’elle cesse de persécuter les minorités ;
  • soutenir et persuader le gouvernement du Bangladesh pour qu’il permette aux Rohingyas d’accéder au travail, à l’éducation et à des abris plus durables.


Ces impératifs commencent à être reconnus. Dans une déclaration publiée au début du mois, le Japon, la Norvège, la Suède, la Suisse et les États-Unis ont souligné « le besoin urgent d’un soutien international durable pour protéger et sauver la vie des réfugiés rohingyas au Bangladesh ».

Alors que les gouvernements et les agences internationales prennent le temps de passer de la parole aux actes, vous pouvez aider dès maintenant en faisant un don. Votre générosité aidera Caritas Bangladesh à se remettre de ce revers et à maintenir et accroître l’aide vitale qu’elle apporte au peuple Rohingya.

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