Communiqué contre les « déportations » abusives à El Seibo

Ce communiqué a été publié en espagnol par certains de nos partenaires, alliés et agences sœurs. Il est reproduit ici avec leur autorisation.

Introduction par Mary Duran, chargée de programmes en Haïti

« Tu te souviendras que tu as été esclave au pays d’Egypte » (Dt 5, 15)

« Soit nous nous battons ensemble pour sauver Haïti, soit nous nous battons seuls pour protéger la République dominicaine ! » C’est ainsi que notre président, Luis Abinader Corona, s’est exprimé lors de l’Assemblée générale des Nations Unies en septembre de l’année dernière.

Un cri qui est né de la nécessité d’aider le peuple haïtien qui souffre de l’absence d’institutions et du fléau des gangs de rues, ce qui représente également une menace pour nous, les Dominicain·ne·s, les voisins les plus proches. La dernière grande réforme de la Constitution de la République dominicaine a pris soin de souligner le caractère garant du système juridique dominicain. Son article 39 stipule que pour l’État dominicain, toutes les personnes sont égales devant la loi et doivent donc recevoir la même protection et le même traitement, car elles jouissent des mêmes droits. Il précise également, conformément à l’esprit constitutionnel le plus actuel, que les droits doivent être exercés sans aucune discrimination « en raison du sexe, de la couleur, de l’âge, de handicap, de nationalité, de liens familiaux, de langue, de religion, d’opinion politique ou philosophique, de statut social ou personnel ». Ces droits comprennent le droit à une procédure régulière (art. 69) et le droit de ne pas être privé de liberté de manière arbitraire ou déraisonnable (art. 71).

En tant qu’organisations religieuses et sociales, nous dénonçons le fait que ce vendredi 15 mars, à partir de 2 heures du matin, les militaires et les agents de la Direction Générale des Migrations (DGM) ont à nouveau procédé à des pratiques illégales et injustes à l’encontre de familles innocentes à Villa Guerrero, dans la communauté de Santa Lucia aux km. 2 et km. 8 dans la municipalité de Santa Cruz de El Seibo, pour procéder à de prétendues déportations d’Haïtien·ne·s.

Il est évident que les droits fondamentaux de ces personnes sont violés, car elles sont détenues pour être expulsées du pays sans avoir suivi les procédures administratives en vigueur et, pire encore, elles sont soumises à des violences et à de mauvais traitements, ce qui crée un climat de peur et de vulnérabilité. Les images et les témoignages que nous avons reçus montrent un traitement inhumain et dégradant de ces personnes, qui, quelle que soit leur origine ou leur situation migratoire, ont droit, en tant que personnes, à un traitement humain et digne. Vous pouvez consulter les témoignages en espagnol sur cette vidéo. Ils ont été enregistrés par l’équipe de Radio Seibo. Il est inacceptable qu’au 21e siècle, des pratiques discriminatoires et violentes à l’encontre de groupes de personnes migrantes ou d’origine étrangère se perpétuent. L’absence de procédures administratives préalable permettant d’évaluer chaque cas individuellement et de garantir le respect des droits humains de ces personnes est une violation flagrante des principes fondamentaux de justice et d’équité.

À cet égard, nous dénonçons :

  • L’enlèvement pour « déportation » d’enfants et de femmes enceintes dans la communauté de Villa Guerrero, la communauté de Santa Lucia, km. 2 et km. 8. qui ont été gravement traumatisés. Depuis ce jour, par crainte d’une répétition de ces événements, les habitant·e·s de ces lieux ne dorment pas chez eux.
  • Le vol d’argent, de téléphones portables et d’autres biens, déguisé en déportation, par des agents de la DGM et des militaires dans les familles des victimes.
  • L’utilisation de la force et des agressions physiques et verbales contre ces mêmes familles.
  • Ces raids ont été effectués illégalement, conformément au protocole d’accord sur les mécanismes de rapatriement, 02/12/1999 (signé par les autorités dominicaines, qui interdit les déportations aux premières heures du matin).
  • La détention abusive de personnes munies de documents dominicains et de documents attestant de leur résidence régulière en République dominicaine qui ont été placées dans le camion de migration.
  • Que les agents de « sécurité » utilisent leur position pour commettre des crimes contre l’intégrité physique et le bien-être des personnes qu’ils sont censés protéger.

Aux premières heures de la matinée, des enfants et des femmes enceintes ont été libérés après avoir suivi le camion de migration jusqu’à Higüey. Un enfant n’a pas pu être débarqué, il a été emmené à Haina et libéré le lendemain par l’Agence des Nations Unies pour les réfugiés (HCR), le Conseil national pour l’enfance (CONANI pour son acronyme en espagnol) et l’UNICEF. Il est à souligner que cet enfant, orphelin de mère, a quitté le domicile de son père par peur de revivre cette terrible atteinte à sa dignité et qu’il ne dort pas la nuit.

Nous comprenons que cet événement, qui s’est déroulé aux premières heures du vendredi matin, n’avait pas pour but de « sauver Haïti », mais il n’avait pas pour but non plus de « protéger la République dominicaine ».

En ces temps difficiles et turbulents, nous ne pouvons pas permettre que nos institutions dominicaines soient utilisées pour commettre des abus. C’est exactement ce que nous voulons éviter : que la violence, le pillage et le désordre affectent nos familles.

Nous exigeons aux autorités dominicaines de mettre immédiatement fin à ces pratiques qui violent les droits de la personne et de garantir des procédures administratives transparentes et équitables pour toutes et tous. Nous demandons au président Luis Abinader d’ordonner la cessation de ces pratiques, qui sont souvent des extorsions et des vols, et nous appelons instamment à la communauté internationale à prendre des mesures concrètes pour protéger les droits de ces personnes, les plus vulnérables de la société dominicaine.

Il convient de noter que, depuis un certain temps, le statut de résidence permanent des personnes dominicaines d’origine haïtienne n’a pas été renouvelé. Elles restent dans un flou juridique après avoir été bénéficiaires de la loi 169-14, promulguée dans le but de résoudre les effets de l’arrêt 168-13, qui a privé rétroactivement le droit à la citoyenneté à plus de quatre générations de Dominicain·ne·s d’ascendance haïtienne sur la base de l’origine de leurs parents.

Que la Vierge d’Altagracia, qui a été un témoin fidèle à Higüey de tels abus sur ses fils et ses filles, intercède pour ces familles et pour une société où nous parviendrons à la paix et à l’harmonie en découvrant que nous sommes des frères, des sœurs et des enfants du même Dieu.

Organisations signataires :

Orden de predicadores, Provincia de Hispania / Red Jesuita con migrantes / Arquidiócesis de Santo Domingo, Pastoral de la Movilidad Humana / Unión Dominicana de Emisoras Católicas / Centro Montalvo / Reconoci.do / Radio Seybo / Parroquia de santo Tomas de Aquino / Conferencia Dominicana de Religiosos/as / Fraternidad Laical Dominica, Santa Catalina de Siena / Manos samaritanas / Ciudad alternativa / Articulación Nacional campesina / Centro misionero católico Hermanas Franciscanas Bernardinas / Fundación Centro Nuestra esperanza / Articulación Nacional Campesina / Fundación Solidaridad Seibana / Dominicos, Centro de Teología / Caminante / Cemiso / Clarkson-Montesinos Institute / Comisión Brasileira de Justicia y Paz / Acción Verapaz en República Dominicana / CLAMOR / Asociación Latinoamericana de Educación y Comunicación Popular, ALER / OPA / Instituto Bartolomé de las Casas, Perú / Programa Latinoamericano de Tierras / Voluntariado de Santa María, Perú / América Latina Alternativa Social, ALAS / Comisión Nacional de Justicia y Paz, Conferencia Episcopal Argentina / Comisión Nacional de Justicia y Paz, Chile / Comisión Episcopal para la Pastoral Social, Perú / Centro de Estudios Fray Bartolomé de las Casas, Cuba / Vicariato Pedro de Córdoba / San Juan de Letrán, Padres Dominicos / Dominicans for justice and Peace / Hermanas Franciscanas Bernardinas / Samba Martine / La merced migraciones / ERBOL, educación radiofónica de Bolivia / Voces nuestras, Centro de Comunicación Educativa, Costa Rica / Institutos radiofónicos de fe y alegría Bolivia / Red de comunidades indígenas Jun Na’oj, Guatemala / Federaciôn Guatemalteca de Escuelas Radiofónicas / Foro Argentino de Radios Comunitarias / madrededios.com, Perú / Viedma, Argentina / Radio Sepailua, Perú / CORAPE, Ecuador / Quillabamba TV, / Parroquia San Pio IX / CIESPAL, Ecuador /Caritas de Ribadedeva / Manos Unidas /Balimayâ, España / Solidaridad con Benin / Obras Misionales Pontificias / Arzobispado Oviedo / Asociación Studium Pro Aequalitas / Fondazione Scalabriniana con Migrante Rifugiati / Asociación Scalabriniana al servicio de la movilidad humana, ASCALA / Anacaona / Dominicas de la Enseñanza de la Inmaculada Concepción / Misioneros Dominicos Selvas Amazónicas / Misioneras Dominicas del Rosario / Acción Verapaz / Secretariado de las Dominicas de España y Portugal / Comité Oscar Romero / Familia Dominicana de España / Fraternidad laical de Santo Domingo / Colectivo indignado / Congregación Santo Domingo / Comisión Justicia Paz et Integridad de la Creación / Justicia Paz e Integridad de la Creación, El Salvador / Justicia, Paz e Integridad de la Creación, Colombia / Ayuntamientos, Parroquias y Asociaciones Culturales de Las Villas, Salamanca, España / José Antonio Hoyos González, encargado parroquial de Villoria / Quintín García González, encargado parroquial de Villoruela / Pedro Miguel Díez Ulzurrum, párroco de Moríñigo / Luis Martín Figuero, párroco de Babilafuente / P. Ricardo M. Santos Then, párroco de la Parroquia Santísima Cruz de El Seibo / Coordinadora Popular Nacional / Centro de Salud Fr. Luis Oregui / Développement et Paix – Caritas Canada

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