Par Minaz Kerawala, Conseiller en communications et relations publiques
En novembre 2022, Caritas Bangladesh a invité Développement et Paix et d’autres membres de Caritas Internationalis à une réunion des partenaires internationaux pour l’aider à revoir son programme d’intervention d’urgence auprès des réfugié.e.s rohingyas. Les délégués ont visité les camps de Cox’s Bazar qui abritent la plus grande population de réfugié.e.s au monde. Les histoires de l’Avent de cette année ont été recueillies dans et autour de ces camps.
Car notre détresse du moment présent est légère par rapport au poids vraiment incomparable de gloire éternelle qu’elle produit pour nous. Et notre regard ne s’attache pas à ce qui se voit, mais à ce qui ne se voit pas ; ce qui se voit est provisoire, mais ce qui ne se voit pas est éternel.
2 Corinthiens 4,17-18
« J’avais une petite boutique et mon propre petit lopin de terre », raconte Zahoor Alam, 35 ans. Ce n’était pas grand-chose, mais la famille arrivait à s’en sortit grâce aux bibelots qu’Alam vendait et au peu qu’il pouvait cultiver.
Tout cela a complètement changé en 2017, lorsque les premiers grands groupes de réfugié.e.s rohingyas de Birmanie (Myanmar) ont afflué dans le village d’Alam, dans le district de Cox’s Bazar au Bangladesh. La même chose se produisait dans des dizaines de villages à travers le sous-district d’Ukhia.
Un accueil généreux
« Nous n’avions pas beaucoup, mais nous les avons aidés du mieux que nous pouvions », déclare M. Alam, se souvenant de la réponse de sa communauté à l’arrivée des réfugié.e.s. « Nous leur avons donné du riz s’ils avaient besoin de riz. Nous leur avons donné un abri s’ils avaient besoin d’un toit. »
Cette attitude accueillante s’est reflétée dans la politique nationale. S’exprimant devant les Nations unies au sujet des Rohingyas, le Premier ministre Sheikh Hasina a déclaré que son pays avait « le choix entre sauver leur vie ou fermer la frontière et les laisser subir un nettoyage ethnique. Nous avons choisi de sauver leur vie au nom de l’humanité. »
Cette décision a été largement appréciée, notamment par le pape François, qui a déclaré : « L’esprit de générosité et de solidarité qui caractérise la société bangladaise s’est manifesté de la manière la plus éclatante dans l’aide humanitaire apportée à l’afflux massif de réfugié.e.s… ».
Aujourd’hui, près d’un million de réfugié.e.s rohingyas, dont plus de la moitié sont des mineurs, vivent au Bangladesh.
Très rapidement, Caritas Bangladesh a compris que les besoins de la communauté d’accueil étaient aussi importants que ceux des personnes réfugiées.
M. Alam dit : « Vous avez changé la vie d’un homme handicapé et sans abri. Vous m’avez rendu ma dignité ! »
Une crise majeure
Longtemps persécutés comme de nombreuses autres minorités, les Rohingyas, un peuple musulman de l’État de Rakhine, dans le nord de la Birmanie, avaient afflué au Bangladesh en plusieurs petites vagues au fil des décennies. Cependant, l’afflux de 2017 a été d’une toute autre ampleur.
En août 2017, des affrontements violents ont éclaté entre une des milices rebelles rohingyas et l’armée birmane. En octobre de la même année, plus de 600 000 Rohingyas avaient fui les persécutions brutales que le Canada a reconnues comme un génocide. La Birmanie fait maintenant l’objet de poursuites et d’enquêtes auprès de tribunaux internationaux.
Aujourd’hui, près d’un million de réfugié.e.s rohingyas, dont plus de la moitié sont des mineurs, vivent au Bangladesh.
Un peuple oublié
Ce sont les chiffres qui ont changé la donne. M. Alam et ses voisins voulaient rester solidaires, mais ils étaient eux-mêmes trop pauvres.
Le gouvernement bangladais est intervenu rapidement pour contrôler la situation. Les agences humanitaires internationales ont suivi de près le gouvernement et des camps de réfugié.e.s officiels ont commencé à être mis en place.
Caritas Bangladesh a été l’une des premières à répondre à l’appel. Grâce aux subventions d’Affaires mondiales Canada et aux généreuses contributions de Canadiennes et de Canadiens, Développement et Paix ― Caritas Canada a pu maintenir son programme d’intervention d’urgence. Ce programme fournit des services d’hébergement, d’approvisionnement en eau, d’assainissement et d’hygiène, de protection, d’éducation, de réduction des risques de catastrophes et de subsistance à des milliers de réfugié.e.s rohingyas.
« Mais personne ne nous aidait », dit M. Alam d’un air sombre. C’est un constat que de nombreux membres de la communauté d’accueil appauvrie ont commencé à faire. « Nous nous sentions vraiment très mal. »
Une situation critique
La vie n’a jamais été facile pour M. Alam. Subvenir aux besoins de sa femme et de ses deux filles âgées de quatre et cinq ans était un véritable casse-tête. « Je suis une personne handicapée. J’ai besoin d’une béquille pour me déplacer », explique-t-il, en ajoutant : « Et puis, mon magasin et mon terrain ont disparu. »
Le magasin a été détruit lorsque le gouvernement a élargi la route qu’il longeait pour améliorer l’accès au Camp 19, raison pour laquelle le terrain de M. Alam avait été exproprié auparavant. « J’ai tout perdu, même ma dignité », déplore-t-il.
« Il y a des centaines de personnes pauvres comme Zahoor Alam dans cette communauté d’accueil », affirme Mohammed Shariful Islam, chargé de programme chez Caritas Bangladesh. « Cette crise les a durement touchés et a mis leur patience à rude épreuve. »
Une réponse efficace
Très rapidement, Caritas Bangladesh a compris que les besoins de la communauté d’accueil étaient aussi importants que ceux des personnes réfugiées. Avec le soutien de Développement et Paix, notre partenaire a commencé à offrir aux familles les plus vulnérables de la communauté d’accueil des possibilités de travail rémunéré, une formation en agriculture et en jardinage, ainsi qu’une formation et un soutien pour le démarrage de petites entreprises.
Ces initiatives contribuent à augmenter la production alimentaire, la nutrition et les revenus des ménages. Elles permettent également de dissiper le ressentiment que certains membres de la communauté d’accueil avaient commencé à éprouver à l’égard des personnes réfugiées.
Une transformation appréciée
En raison de son handicap, M. Alam a reçu un soutien prioritaire. « Nous avons réalisé que son besoin le plus urgent était le logement », explique M. Islam. « Nous avons donc construit pour lui un abri adapté à ses besoins en matière de mobilité. »
Petit à petit, la vie de M. Alam a commencé à changer. La participation à des programmes de travaux rémunérés et la culture de produits de subsistance, comme le maïs et les légumes, sur un petit champ à côté de son nouvel abri, lui ont permis de gagner un petit revenu. « Je peux maintenant envoyer ma fille à l’école », se réjouit-il.
M. Alam aime aussi sa nouvelle maison. « Elle est très confortable et pratique », rapporte-t-il. Il apprécie particulièrement le fait de pouvoir se déplacer sans aide dans sa maison et dans sa cour. Il ajoute : « Je me sens khoob bhalo (très bien) ! »
« Un grand, grand merci à Caritas Bangladesh et à vos donateurs au Canada, » dit M. Alam, « Vous avez changé la vie d’un homme handicapé et sans abri. Vous m’avez rendu ma dignité ! »
Dans des dizaines de pays et des centaines de communautés du Sud, la vie de milliers de personnes comme Zahoor Alam est transformée grâce à la générosité de nos personnes donatrices, ainsi qu’au dévouement et à l’amour de nos partenaires.
En cette saison de partage, pensez à faire un don afin que nos partenaires puissent continuer à restaurer la dignité.
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